Rester seule tout la journée n'était pas le truc le plus amusant que j'ai fait en 97 ans d'existence. C'etait la première fois que je trouvais réellement le temps long. Je devais entrer au lycée dans quelques jours, et il fallait dire que je stressais de plus en plus. J'étais allongée sur mon lit. Je pensais aux évènements récents, et à mes sentiments dessus. Je ne savais pas vraiment quoi penser d'Alex. Je le trouvais sympathique, et j'appréciais réellement nos rencontres. Je me sentais en sécurité près de lui. Bizarrement, il m'avait délivré de ma peur des hommes. Avec lui, j'étais plus moi même, moins renfermée. Et puis il y avait Gabriel. J'étais tellement heureuse qu'il soit revenue. Je pris mon journal sur mon bureau et le feuilletait rapidement. Avec le don de l'immortalité, on oubliait plus facilement les choses. J'avais donc pris l'habitude d'écrire tout les évènements marquants de ma journée, mes sentiments, les lieux que j'avais aimés ...

Je me levais et décidais d'aller me doucher. C'était quelque chose qui me détendait. Sentir l'eau chaude sur ma peau. J'enfilais rapidement une robe blanche cintrée sous la poitrine. Je l'avais achetée il y a peu. Ce jour là, Gabriel était avec moi, et il avait eu l'air d'apprécier la tenue. Je souris intérieurement. Je mis des sandales. Puisque je ne sortais que dans le jardin, je n'avais pas besoin de me couvrir comme en hiver pour tromper les humains. Je descendis donc. Arriver en bas, j'entendis Bastet miauler. Elle devait sûrement avoir faim. Je la trouvait sur le tapis du salon, ses grands yeux verts tournés vers moi, me suppliant de la nourrir. Un petit rire cristallin s'échappa de mes lèvres. Je la pris dans mes bras pour l'emmener dans la cuisine. Tout en lui servant des croquettes, je pensais que c'était étrange qu'en tant que vampire végétarien je n'ai jamais eu envie de mordre mon chat. Je sortis de ma rêverie et de la maison en même temps.

Les parfums du jardin m'assaillirent. Ils étaient tous parfaitement accordés les uns aux autres. Maman et moi passions beaucoup de temps ici depuis que l'on s'y était installé. Je me promenais distraitement dans le jardin quand une odeur particulière attira mon attention. Parmi toutes les senteurs des fleurs, j'avais senti une odeur étrangère. Un vampire. Un inconnu. Avant, j'aurais eu peur et serait retourné discrètement dans la maison. Mais aujourd'hui, je me sentais d'humeur téméraire. Je dépassais alors le par-terre de lys pour me cacher derrière le saule pleureur. L'intrus était un homme de taille moyenne, les cheveux bruns et la peau blanche. Je ne voyais pas son visage, il était de dos. Puis, il se retourna vers moi. Je ne sais pas s'il me vit, mais moi je vis ses prunelles oranges. Oranges ?! Alors, se pourrait-il que ... qu'il soit végétarien ?! Je n'avais jamais rencontré d'autre végétarien que ceux de ma famille. Se pouvait-il que ce soit le fameux Stefan dont Gab m'avait parlé ? Mon self-contrôle de tout à l'heure avait fait place à de l'incrédulité. Je sortis alors doucement de ma cachette pour ne pas l'effrayer et m'approchais à pas lent de lui. J'avais un peu l'air d'une apparition dans ce jardin avec mes cheveux blonds et ma robe blanche flottant dans le vent. Puis d'une voix méfiante, je lui demandais « Puis-je vous aider ? »

Le vampire devait avoir sentit mon odeur car il ne fut pas surpris de mon arrivée. Mon interlocuteur souris légèrement à ma question. Puis il ôta sa veste de cuir et la posa sur sa moto. Elle était belle. Je n'avais jamais été fan de moto, ça me faisait peur. Même maintenant que j'étais immortel, je regardais toujours ces engins avec une certaine crainte. Mon regard se reposa une nouvelle fois sur le vampire face à moi. Sous sa veste qu'il venait d'enlever, il portait une chemise blanche, sans manche. Il prit rapidement la parole, m'expliquant la raison de sa venue. « Je suis a la recherche d'Hélèna. » Cette révélation me décontenança quelques peu. Maman voyait-elle un homme ? Elle ne nous en avait pas parlé, en tout cas, pas à moi mais peut être Gabriel était-il au courant. J'ouvrais de grand yeux écarquillés. « Je m'appelle Chris. » Je me raclais rapidement la gorge pour ne pas perdre contenance. « Hum.. Enchantée, moi c'est Céleste. » C'est alors que je remarquais vraiment la couleur étrange de ses yeux. Ils étaient entre le rouge et le orange, comme si il avait mélangé son alimentation. Je me mordillais la lèvre inférieur pour éviter à ma curiosité de parler à ma place.

Il avait fixer son regard sur moi, et j'avoue que ça me mettait mal à l'aise. Mon assurance de tout à l'heure s'était subitement évaporée. Pourtant, j'étais chez moi, dans mon élément, entourée de la nature qui me donnait habituellement des ailes. Je replaçais une mèche de mes cheveux dorée derrière mon oreille. Je ne devais pas me laisser déconcerter par un parfait inconnu qui plus est chez moi. J'étais tout de même un peu moins méfiante envers ce Chris. Si il cherchait Héléna, c'est qu'il devait la connaître, et donc que je n'avais rien à craindre de lui. Une ombre de sourire passa sur mon visage. « Comment avez-vous rencontré ma mère ? » Je n'avais pas besoin de préciser qu'elle n'était pas là, il devait sûrement s'en douter avec son odorat sur-développé. Je réfléchis quelques secondes à mes paroles, et je réalisais que je n'aurais pas du dire "ma mère". Cela allait lui paraitre bizarre, car elle n'était pas vraiment ma mère, mais je la considérais comme telle, et je ne l'appelais presque jamais par son prénom. Je tentais donc de me reprendre. « Enfin ... comment avez-vous rencontré Héléna ? » J'entortillais une mèche de cheveux autour de mon doigt. C'était une sale manie que j'avais gardé de mon ancienne vie. Je m'assis finalement à même l'herbe, au plus près des fleurs auquel mon parfum se mariait si bien. Je savais que les vampires n'avaient pas la nécessité de s'assoir car ils ne connaissaient pas la fatigue, mais là c'était différent. J'avais l'habitude d'être très proche de la nature.